Au fil des réformes de décentralisation, l’échelon intercommunal a gagné en compétences, que ce soit en matière d’urbanisme, de développement économique ou encore de transition écologique. Ronan Kerdraon, maire divers gauche de Plérin (22) et Président de Saint-Brieuc Armor Agglomération, nous présente les projets et ambitions portés au sein de son intercommunalité.
Nous sommes à mi-chemin de la mandature 2020-2026. Pouvez-vous nous éclairer sur les investissements de Saint-Brieuc Armor Agglomération à venir ?
Le budget global de Saint-Brieuc Armor Agglomération pour l’année 2023 s’élève à 259 millions d’euros, et 41% des fonds sont redéployés dans des investissements. Les crises successives ont durement impacté la collectivité, nous obligeant à revoir le PPI (Plan Pluriannuel d’Investissement). Mais nous avons toujours été animés par la volonté de maintenir nos investissements. À ce PPI révisé, nous lui avons assigné trois ambitions : il doit être ambitieux, pragmatique et réaliste.
Le premier poste d’investissement concerne l’amélioration de la qualité des eaux et le traitement des déchets. 30 millions d’euros sont affectés à la nouvelle usine de traitement de l’eau et entre 10 et 12 millions d’euros sont fléchés vers l’assainissement.
La deuxième priorité est le développement du mix énergétique, avec le lancement d’une filière hydrogène. Le projet repose sur un schéma partenarial élargi qui réunit des acteurs privés et publics, notamment la CCI, la banque des territoires, le Conseil régional et un cluster de plus de 200 entreprises. L’agglomération de Saint-Malo nous a également rejoint dans ce consortium.
Nos investissements ont ainsi vocation à s’inscrire dans une véritable stratégie liée à la transition environnementale, au service du développement économique de la Bretagne Nord et de l’activité des entreprises locales.
Sujet au cœur de l’actualité, le Zéro Artificialisation Nette (ZAN). Comment la collectivité se projette dans sa politique en matière d’urbanisme et de gestion du foncier ?
D’ici 2040, l’agglomération de Saint-Brieuc va connaître une hausse démographique significative, avec l’arrivée de 12 000 habitants. Un autre enjeu retient toute notre attention, celui du vieillissement de la population. Face à la forte pression foncière, comment accueillir des jeunes familles, créer un parcours résidentiel ? Comment offrir aux personnes âgées les infrastructures nécessaires et adaptées ?
La loi instaurant le ZAN était, à mon sens, nécessaire. Le problème, c’est que le législateur a tendance à faire des lois mais oublie en contrepartie d’enlever les « couches sédimentaires »… Au-delà de cette complexité, notre agglomération a souhaité faire du ZAN une opportunité pour créer de la valeur en termes d’emploi et de fiscalité. Cette logique de sobriété foncière ne doit pas être perçue comme punitive, mais une opportunité d’innovation territoriale. Sur la période 2021 – 2031, notre modèle d’aménagement a été revu autour de trois axes : optimisation foncière ; rénovation du bâti existant ; renouvellement urbain.
Cette nouvelle orientation doit être soutenue par les citoyens et les maires. A cette fin, nous avons organisé plus de 200 rencontres avec les élus concernés. Par ailleurs, nous avons une singularité à Saint-Brieuc Armor Agglomération : la gouvernance est partagée (la première vice présidente est issue de la minorité) ce qui permet d’être davantage dans une dynamique de co-construction. Le PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal) a ainsi été voté à l’unanimité par les maires de l’agglomération, avec une perspective d’un ZAN en 2040.
« Cette logique de sobriété foncière ne doit pas être perçue comme punitive, mais comme une opportunité d’innovation territoriale »
Pour répondre aux défis liés à la transition écologique, il convient d’intensifier la rénovation énergétique du parc existant. Comment Saint-Brieuc Armor Agglomération accompagne cette dynamique ?
Pour encourager la rénovation énergétique des logements, nous avons augmenté les aides de près de 55 % par rapport au mandat précédent. Une prime à la performance énergétique de 5000 euros a également été créée, mobilisable si le logement, après travaux, a une étiquette énergétique au moins B. Tout cumulé, cela représente au final un potentiel d’aide de 18000 euros HT par logement.
Autre initiative de la collectivité, l’élaboration d’un cadastre solaire, une cartographie interactive qui nous permet de déceler le potentiel solaire des toitures et d’évaluer la rentabilité des panneaux solaires.
En parallèle, on souhaite lancer un grand chantier de rénovation de nos bâtiments publics et de nos infrastructures.
Autre compétence phare de l’échelon intercommunal, le développement économique. Quelles sont les actions engagées pour soutenir le tissu économique local ?
L’EPCI (Etablissement Public de Coopération Intercommunale) souhaite être proactif dans le développement économique des 32 communes du territoire. Une conférence des maires se déroule une fois par mois, où chaque élu a une voix et les décisions y sont prises en recherchant toujours le consensus. C’est un élément fort pour mettre en œuvre les projets économiques.
Différentes aides sont également mobilisables pour soutenir les entreprises : par exemple le pass TPE commerce-artisanat, co-construit avec le Conseil régional, le dispositif d’aide à l’immobilier d’entreprise ou encore le dispositif « esprit start up ».
Depuis la crise Covid, on a abondé les aides régionales qui s’élevaient à 2 millions d’euros. Sur 3 ans, cela représente un investissement de 5 millions d’euros. C’est important de soutenir les entreprises locales, elles sont une force pour l’attractivité de notre territoire. Elles garantissent le maintien de l’emploi, la survie de nos communes. Pour accompagner au mieux le tissu économique local, nous avons également besoin de l’Etat à nos côtés.
« Les entreprises locales sont une force pour l’attractivité de notre territoire »
Le bâtiment est l’un des principaux acteurs économiques costarmoricains. Quelle est votre vision de cette filière ?
Le bâtiment est en effet un secteur important dans le département, avec près de 12300 salariés. Je souhaite que les marchés publics puissent servir au développement de cette filière locale. Par exemple, à la salle polyvalente de Plérin, j’ai demandé à ce que l’on pose une plaque avec le nom de toutes les entreprises qui sont intervenues sur le chantier. C’est symbolique mais pour moi, il est important de valoriser les entreprises locales et le travail de leurs salariés.
Nous avons également la chance d’avoir sur notre territoire une filière de formation dynamique pour votre secteur (le CFA du Bâtiment, la Chambre des Métiers, etc). Je suis, d’ailleurs, fier d’avoir accueilli en début d’année au Parc des Expositions de Saint-Brieuc la Compétition des Métiers. Cette manifestation est une belle opportunité pour mettre en lumière les jeunes qui s’engagent dans le bâtiment et les savoir-faire que requièrent vos métiers.