RENOVATION ENERGETIQUE : De l'échauffement au sprint !

Premier poste de consommation d’énergie et troisième en termes d’émission de gaz à effet de serre, l’implication du secteur du bâtiment est incontournable dans la lutte contre le dérèglement climatique. Pour engager sa mue écologique, différentes actions sont conduites depuis plusieurs années : déploiement du photovoltaïque et des filières de recyclage des déchets, développement du réemploi et des matériaux bio-sourcés, montée en puissance des modes constructifs plus vertueux entre autres. La massification de la rénovation énergétique apparaît également comme une priorité pour réussir cette transition.

Autre élément qui a participé à cette prise de conscience, les crises successives. Comme l’a identifié l’ADEME*, elles ont joué un rôle de catalyseur dans la démarche de transition écologique. Le COVID a ainsi mis en exergue l’attachement des français à leur logement, qu’il soit confortable aussi bien thermiquement qu’acoustiquement. La guerre en Ukraine a souligné le poids des dépenses énergétiques dans le pouvoir d’achat des français et le budget de fonctionnement des collectivités territoriales. A cela s’ajoute la chute de la construction neuve : elle impose de proposer d’autres pistes aux citoyens pour se loger et aux entreprises du bâtiment d’acquérir des compétences spécifiques.

L’ensemble de ces facteurs convergent vers la nécessité d’accélérer significativement la dynamique autour de la rénovation thermique des logements et des bâtiments publics. Cette affirmation fait, d’ailleurs, consensus chez toutes les parties prenantes ! Mais pour qu’elle se concrétise, plusieurs enjeux doivent être relevés :

  • Les enjeux techniques, car une rénovation s’avère plus complexe qu’une construction neuve. Cela implique d’être bien entouré, c’est-à-dire de bénéficier de l’accompagnement d’un expert – dans les démarches et le suivi du projet – et de pouvoir compter sur des professionnels qualifiés pour réaliser les travaux.
  • Les enjeux financiers. Une opération de réhabilitation est en général plus onéreuse. D’où l’importance de dispositifs financiers incitatifs pour enclencher le projet.
  • Les enjeux sociétaux, étant donné que le neuf demeure toujours plus attractif pour des raisons financières et de facilité de travaux.

Dans ce cahier spécial, nous avons souhaité donner la parole à différents types d’acteurs : élu, architecte, entreprise, organisme de formation. Selon eux, comment peut-on relever ces enjeux et ainsi accélérer la rénovation énergétique des bâtiments ?

* Étude de l’ADEME de septembre 2023 – du COVID 19 aux nouveaux défis économiques et énergétiques : quels impacts sur le secteur du bâtiment et de l’immobilier ?

Catherine Guerniou, Présidente de la Commission Transition Ecologique de la FFB Nationale

André Crocq, Conseiller Régional

Dominique Cap, Président de l’AMF du Finistère

Maxime Le Trionnaire, Président de l’Ordre des Architectes de Bretagne

Steeve Deschodt, Gérant d’Eco Breizh 22

Cyril Barranco, Directeur de Bâtiment CFA Bretagne

A vos marques….

Pour la Présidente de la Commission transition écologique de la FFB nationale Catherine Guerniou, la massification de la rénovation énergétique est un défi atteignable ! Elle développe le cadre dans lequel cette ambition doit s’inscrire.

Chef de file des collectivités en matière de transition écologique, l’échelon régional est une pièce maîtresse dans la déclinaison de la stratégie nationale. André Crocq, conseiller régional, détaille les dispositifs mis en place en Bretagne afin d’accompagner cette massification.

Le premier pilier, c’est la planification. Les entreprises ont besoin de visibilité pour les sécuriser dans leurs investissements et dans la formation de leurs collaborateurs. On nourrissait d’ailleurs beaucoup d’espoirs dans la mise en place d’un secrétariat à la planification écologique.

L’accompagnement des pouvoirs publics est également un point essentiel. Aujourd’hui, plusieurs leviers sont mobilisables, tels que les Certificats d’Economie d’Energie, le dispositif MaPrimRénov’, l’Eco-Prêt à Taux Zéro, ainsi que le décret tertiaire visant les bâtiments de plus de 1000 m2.

Enfin, la stabilité est un prérequis pour un développement serein de ce marché.

Au cours du 1er trimestre 2024, le marché de la rénovation énergétique s’est effondré. Pouvez-vous nous éclairer sur les raisons ?

C’est principalement à cause des changements de règles et, plus largement, des revers permanents que nous subissons ! Au 1er janvier 2024, les conditions d’éligibilité au dispositif MaPrimRénov’ ont été resserrées, en passant du mono-geste à la rénovation globale. On a également intégré une nouvelle entité, Mon Accompagner Rénov’, destinée à accompagner les particuliers dans leurs projets. Cette intention était louable ! Mais cette mesure a été décrétée sans se soucier de la quantité d’accompagnateurs disponibles sur le territoire. Or aujourd’hui, il
faut attendre trois voire six mois pour bénéficier d’une évaluation, ce qui décourage de nombreux ménages. L’autre frein est d’ordre financier : il s’agit de travaux coûteux et l’accès au prêt est actuellement très restreint.

Le cumul de ces facteurs explique le blocage du marché durant les cinq premiers mois de l’année. Des entreprises ont même dû licencier des salariés, en raison de l’effondrement des chantiers de rénovation.

Depuis mi-juin, en particulier avec le retour en arrière sur le dispositif MaPrimRénov’, les carnets de commandes des entreprises se remplissent de nouveau. Ce qui est décevant, c’est que la Fédération avait, bien en amont, alerté les pouvoirs publics sur la contre-productivité de telles décisions.

Je plaide pour la progressivité ! A savoir des bouquets de mono-gestes avec des paliers, des critères à atteindre dans un certain délai. Vous vous mettez en ordre de
marche sur votre rénovation énergétique et vous mettez ça en place sur plusieurs
années. Par exemple, « aujourd’hui je fais mon isolation, dans deux ans je change mon chauffage ».

De plus, nous faisons face à une fraude massive. Or, ce qui intéresse le fraudeur, c’est d’avoir l’argent tout de suite. En ce sens, la rénovation globale est beaucoup plus appétente financièrement que la logique de bouquet de travaux. Il faut savoir que les fraudeurs ne sont pas des gens de métiers. Nos adhérents sont soucieux de la qualité de leur travail et du gain énergétique qui va en résulter.

Pouvez-vous nous présenter l’ambition du Conseil régional en matière de rénovation énergétique ?

A l’origine de cette ambition, la Breizh Cop ! Lancée en 2017, cette concertation nous a permis de recueillir les contributions des bretons (acteurs socio-économiques, société civile, associations, etc.) et de co construire avec eux un projet pour le territoire à l’horizon 2040. Cette démarche participative était essentielle au vu des défis majeurs à relever : l’urgence environnementale, les déséquilibres territoriaux et la fragilité de notre cohésion sociale.

L’accélération de la rénovation énergétique est l’une des clefs. Pour diminuer le poids du bâtiment dans les émissions de gaz à effet de serre. Pour éradiquer la précarité énergétique, qui touche en particulier les plus vulnérables. C’est pourquoi nous avons fixé des objectifs ambitieux dans le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires adopté en décembre 2020. Nous souhaitons ainsi réduire de 39 % les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2040 et augmenter significativement le rythme de réhabilitation des logements, pour tendre vers 45 000 logements par an.

Pour atteindre ces objectifs, quelles sont les actions menées par le Conseil régional ?

Plusieurs leviers sont mobilisés ! Pour réaliser ces travaux, il est d’abord primordial d’avoir des professionnels qualifiés. C’est tout l’objet de la politique de la formation professionnelle engagée par la Région. En lien étroit avec les acteurs économiques dont la FFB Bretagne -, nous construisons des programmes destinés à adapter et faire monter en compétences les bretons. Par exemple, dans le cadre du dispositif Qualif ’Emploi nous avons intégré des modules de photovoltaïque dans toutes les formations en couverture. Nous adaptons également l’offre de formation dispensée par les lycées en collaboration avec le rectorat.

Par ailleurs, nous pilotons avec l’Etat et les intercommunalités le réseau de proximité Rénov’ Habitat Bretagne : il propose un accompagnement personnalisé et gratuit aux ménages enclenchant une démarche de rénovation. A ce jour, nous dénombrons 120 points de conseil. Entre 2020 et 2022, près de 9 millions d’euros ont été engagés par la Région sur ce dispositif.

La Région est également propriétaire d’un patrimoine immobilier potentiellement énergivore. Est-ce que des fonds sont fléchés vers la rénovation de ce parc ?

La Bretagne est effectivement propriétaire de 115 lycées.

Nous avons adopté le Plan Energie Lycées qui vise la réduction de 60 % des consommations énergétiques et de 50 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050. Ce programme s’articule en plusieurs temps. Tout d’abord, des audits sont réalisés dans les établissements, à un rythme de 15 par an, pour dresser un état des lieux des consommations. A partir de ce diagnostic, nous pouvons passer à la phase travaux ! L’objectif est de rénover au moins 3 sites par an, soit un investissement financier de la Région de 20 millions d’euros sur les 100 millions d’euros fléchés annuellement vers les travaux des lycées.

Et l’Europe dans tout ça ?

Entrée en vigueur en octobre 2023, la directive européenne relative à l’efficacité énergétique relève les objectifs des Etats membres de l’Union
Européenne. Ainsi, d’ici 2030 :

  • Tous les nouveaux bâtiments devront être « zéro émission » ;
  • Pour les bâtiments résidentiels, des mesures devront être déployées pour garantir une réduction de la consommation moyenne d’énergie d’au moins 16 % ;
  • Les États membres devront rénover les 16 % des bâtiments non résidentiels les moins performants.

Pour accompagner ce plan, plusieurs sources de financements ont été débloquées. Elles sont gérées par l’État ou les collectivités puis mobilisables par les porteurs de projets.

Prêts…

Pour déployer cette stratégie, deux acteurs locaux sont incontournables.

En premier lieu les communes, à la tête d’un parc immobilier important et au plus proche des citoyens. Dominique Cap est maire de Plougastel- Daoulas (29) et préside l’Association des Maires et des Présidents d’intercommunalités (AMF) du Finistère. Il nous expose la dynamique des élus locaux et de quels outils ils disposent pour accélérer cette sobriété énergétique.

Deuxième acteur, les architectes. Interlocuteurs des collectivités mais aussi des particuliers, ils apportent leur expertise technique durant tout le déroulé du projet. Maxime Le Trionnaire, Président de l’Ordre des Architectes de Bretagne, nous éclaire sur la vision et l’engagement de sa profession.

Un rapport sénatorial a souligné les hausses des dépenses énergétiques des collectivités suite à la guerre en Ukraine. Quel a été l’impact dans votre département ?

Cette crise a eu un impact financier énorme. Dans le Finistère, 95 % des communes ont comme structure gestionnaire le SDEF (Syndicat Départemental d’Énergie et d’Équipement). L’inflation est malheureusement arrivée au même moment que le renouvellement du contrat du SDEF. On a dû signer à des tarifs extrêmement élevés, avec des conséquences importantes pour les collectivités. La majorité des maires ont été contraints de couper dans les investissements car nous avons l’obligation d’avoir des budgets à l’équilibre.

Si je prends l’exemple de ma commune, Plougastel-Daoulas, le coût de l’électricité a été multiplié par quatre ! Comme nous ne disposions pas de visibilité sur le moyen terme, nous avons décalé certains programmes d’investissements. Des économies ont également été réalisées, par exemple sur la température des bâtiments.

Face à cette inflation, un plan de rénovation des bâtiments des collectivités a été lancé. Comment s’est-il décliné dans le Finistère ?

Souvent, c’est dans les crises que l’on prend aussi des bonnes mesures. Le fonds vert, fléché sur les équipements publics, a ainsi été mis en place. D’autres financements importants vont également arriver sur la rénovation des écoles. En 2023, le fonds vert a été très sollicité, avec une forte volonté des communes finistériennes de réorienter leurs investissements sur la rénovation énergétique de leurs bâtiments. A l’inverse, on constate en 2024 un fléchissement des demandes. Mais je suis confiant : je pense que c’est « le contrecoup » de l’accélération de l’année précédente, nous devrions retrouver une bonne dynamique en 2025.

Et sur le logement, comment les communes peuvent-elles agir ?

Nous accompagnons financièrement les bailleurs sociaux dans leurs programmes de rénovation. S’agissant de l’habitat privé, nous n’avons pas cette compétence. Là où nous sommes en responsabilité, c’est sur la construction et en particulier le foncier. Depuis trois ans, j’alerte sur la mise en place du ZAN (Zéro Artificialisation Nette). Consommer moins de foncier, nous n’y sommes pas opposés. A l’image de la loi « littoral » : c’était une contrainte mais nous avons été en capacité de l’intégrer. En revanche, le ZAN manque clairement de pragmatisme.

Sur la période de référence 2011 – 2021, la consommation de terres en Bretagne est estimée à 18 000 hectares. Nous avons l’obligation de la diviser par deux sur 2021 – 2031. Sauf que le compteur tourne depuis 2021 et que certains territoires ont déjà consommé toute leur enveloppe ! Et nous ne sommes qu’au début des problèmes. Prochainement, au sein de chaque intercommunalité sera négociée la répartition des hectares constructibles. Au bout de la chaîne, de nombreux maires devront annoncer à des habitants que leur terrain constructible hier ne le sera plus demain, avec derrière des risques de contentieux.

Un chantier de réhabilitation vertueux

La Commission environnement de la FFB Bretagne a visité le 6 juin 2024 le projet du Rozic à Dirinon = (29). Ce chantier, impulsé par la mairie et suivi par l’architecte Florian Carré, vise à réhabiliter une ancienne résidence de 1000 m2 qui regroupera plusieurs structures communales (la mairie, la médiathèque, la poste, des salles associatives notamment).

Dans ce chantier, la plupart des structures existantes ont été conservées et les matériaux, tels que les ardoises et les baies vitrées, réemployés. La sobriété énergétique du futur bâtiment a également été scrutée de près. Une opération d’envergure, conciliant résilience écologique et budgétaire : alors qu’une construction sur ce type d’ouvrage s’élève en moyenne à 2000 euros du m2, le projet du Rozic revient à moins de 900 euros le m2.

Quelle vision avez-vous aujourd’hui du marché de la rénovation énergétique en Bretagne ?

On observe une forte hausse des projets de rénovation, tant dans le secteur privé que public, sur les programmes de logements comme pour les projets d’équipements.

Cette évolution est liée à plusieurs facteurs.

Tout d’abord les enjeux environnementaux qui amènent à repenser l’aménagement des territoires. Limiter l’étalement urbain pour réduire l’artificialisation des sols, mais également repenser les mobilités pour diminuer la dépendance aux énergies fossiles. La rénovation ressort comme une solution évidente pour limiter les consommations d’énergie et décarboner la construction.

Les enjeux sociaux viennent conforter cette transition : proposer une offre de logements adaptée à l’évolution des usages, des parcours et des modes de vie, est essentielle pour assurer un équilibre social.

A ces facteurs s’ajoutent les enjeux économiques. La hausse des coûts de construction combinée à celle des taux d’intérêt a bloqué l’équation commerciale, alors que la demande en logements est toujours croissante. Comme l’ensemble des acteurs du secteur, les architectes sont directement impactés par cette crise, avec des missions interrompues qui fragilisent nos agences.

Pour toutes ces raisons, les architectes sont non seulement convaincus, mais aussi naturellement tournés vers la rénovation. Nous sommes mobilisés pour accompagner les décideurs, maîtres d’ouvrage et collectivités. Il est fondamental de se saisir collectivement du sujet.

La ville de 2050 est déjà construite à 80 %. Faire la Ville de demain, c’est réparer la ville d’aujourd’hui.

Quelles pistes permettraient de mieux accompagner l’ensemble des acteurs dans les projets de rénovation des bâtiments publics ?

Nous pensons que la rénovation énergétique doit s’inscrire dans une approche plus globale, pour intégrer les questions d’usage et d’adaptation du bâti.

Dans cette optique, les architectes assurent leur mission à l’interface entre les différents acteurs du projet : maîtres d’ouvrage, usagers, bureaux d’études et entreprises. Ils une vision d’ensemble qui permetd’optimiser les améliorations énergétiques, techniques, fonctionnelles, architecturales et urbaines.

La connaissance du bâti est un préalable, une clé de réussite de ces projets. Il convient de renforcer les phases de diagnostic afin de mieux identifier en amont les potentiels et les faiblesses des constructions et ainsi gagner en efficacité sur les scenari envisagés. Il s’agit d’accompagner les maîtres d’ouvrage à une meilleure maîtrise de leur patrimoine pour mieux encadrer et définir les programmes.

Pour assurer ces missions, les architectes se forment tout au long de leur carrière sur les aspects techniques et environnementaux.

Partez !

La montée en puissance du marché de la rénovation énergétique requiert des professionnels qualifiés. Bâtiment CFA Bretagne, qui regroupe plus de 3500 apprentis sur les quatre départements bretons, développe une offre de formation autour des enjeux liés à la transition écologique, comme nous l’explique son directeur Cyril Barranco.

Mais la liste des diplômes et formations existantes présente encore des lacunes. Pour preuve le témoignage d’Eco-Breizh 22, une entreprise de 3 salariés implantée à Saint-Quay-Portrieux (22) et spécialisée dans l’ITE (isolation thermique par l’extérieur). Alors que son activité est essentielle dans le cadre d’une rénovation énergétique, Steeve Deschodt éprouve des difficultés de recrutement, en raison notamment de l’absence de formation initiale en isolation.

L’isolation est un métier à part entière. Or, nous n’avons pas de source de formation spécifiquement dédiée. Des modules sont dispensés dans le CAP plâtrier-plaquiste ainsi que dans le CAP couvreur. Mais dans ces deux domaines, je ne peux pas prendre un apprenti car il ne pourrait pas mettre en pratique toutes les connaissances théoriques acquises au CFA. Il perdrait son temps et aurait du mal à obtenir son diplôme. On est vraiment entre deux eaux par rapport aux formations de base.

De quelles alternatives disposez-vous pour former vos salariés ?

Quand ils arrivent au sein de l’entreprise, ils ont trois mois d’apprentissage en interne, sur le terrain. J’ai une expérience de 14 ans en isolation pure, donc je les forme sur les produits et les techniques. En parallèle, ils partent dans des formations liées à la sécurité, notamment pour le travail en hauteur, proposées par la FFB 22. Ils peuvent également suivre des modules spécifiques mis en place par les fournisseurs, comme la ouate de cellulose. L’isolation à proprement parler, c’est surtout bien connaître le produit : c’est à la portée de tout le monde de poser de l’isolation. Ce n’est pas quelque chose qui demande beaucoup de technicité – mis à part le travail en hauteur – à la différence de la charpente ou de la couverture.

Oui, c’est incompréhensible car nos métiers sont en première ligne sur la rénovation énergétique ! Que ce soit au niveau des DPE, des audits énergétiques ou des accompagnateurs MaPrimeRénov’, l’isolation revient toujours en priorité avec l’énergie, les points de chauffe. J’aimerais bien avoir des salariés formés au moins sur la théorie, et puis qu’il reste la pratique de mon côté.

Actuellement nous sommes trois dans l’entreprise et on souhaiterait recruter encore trois personnes. Le fait qu’on n’ait pas de diplôme attitré pour former nos salariés amplifie le problème du recrutement, déjà très présent pour les autres métiers du bâtiment… On ne sait pas où aller les chercher ! Nous misons beaucoup sur le réseau. A défaut d’avoir un métier connu et reconnu, l’entreprise a l’avantage d’être bien identifiée localement, d’avoir une bonne réputation. Pour attirer, nous mettons en avant les conditions de travail attractives, que ce soit au niveau des salaires, de l’ambiance, de la qualité de vie. En outre, dans mes embauches, je mise davantage sur l’humain que sur le CV. Mes deux salariés actuels n’ont d’ailleurs pas de « vernis bâtiment », ils viennent tous les deux du commerce. Bref, on se débrouille pour trouver et former !

La dynamique autour de la rénovation énergétique appelle de nouvelles compétences. Comment Bâtiment CFA Bretagne adapte son offre de formation initiale pour y répondre ?

Nous le faisons de plusieurs manières. La première consiste à retravailler les blocs de compétences des formations existantes pour les adapter aux besoin des entreprises et aux défis environnementaux, en lien avec l’éco-construction et les éco-matériaux notamment. La seconde est de créer des modules de formations spécifiques sur la rénovation énergétique et les énergies renouvelables. Enfin, nous sommes en capacité de mettre en place des actions ponctuelles (Préparation Opérationnelle à l’Emploi Collective, Qualif emploi …), en réponse à un besoin territorial des entreprises.

Sur le champ de la formation continue, vous avez récemment initié plusieurs actions en lien avec la rénovation énergétique. Pouvez-vous les présenter ?

La montée en compétence de tous les actifs est une priorité pour notre structure. Elle se décline en plusieurs enjeux : former les salariés tout en garantissant la compétitivité des entreprises, accompagner les professionnels dans l’identification des compétences de demain, en anticipant les évolutions des métiers, mais aussi favoriser les reconversions professionnelles.

C’est dans ce contexte que nous avons mis en place le Titre Pro chargé d’affaires en rénovation énergétique du bâtiment, dispensé au CFA de Montgermont. Il vise à former des professionnels capables de gérer des projets de rénovation énergétique de A à Z. Les premiers retours sont très positifs : les quatorze stagiaires, principalement en reconversion, se sentent mieux armés pour répondre aux exigences du marché et des entreprises.

Vous avez engagé plusieurs projets : la stratégie « Imagine 2026 », l’implantation prochaine d’un CFA à Loudéac notamment. Comment les enjeux liés à la rénovation énergétique sont-ils pris en compte ?

Ils sont pleinement intégrés dans les chantiers de Bâtiment CFA Bretagne, y compris au sein même de nos établissements. Le projet de Loudéac s’inscrit dans cette dynamique puisque nous réhabilitons des locaux existants.

Par ailleurs, un volet essentiel de la stratégie « Imagine 2026 » porte sur le renforcement de l’offre de formation en lien avec la transition énergétique et la promotion des métiers du bâtiment durable.

Par exemple, l’offre du CFA de Loudéac couvrira, à terme, à la fois les fonctions de production (constructeur bois, couvreur, …) et d’encadrement (conducteur de travaux) mais aussi des formations en lien avec l’éco construction et les énergies renouvelables, telles que le photovoltaïque. De cette façon, Bâtiment CFA Bretagne souhaite contribuer activement à la transition énergétique du secteur du bâtiment en Bretagne.

L’offre de service de Constructys

Pour soutenir les entreprises du bâtiment s’engageant dans la transition environnementale, Constructys a développé une palette d’outils autour de 3 clés d’entrée : sensibilisation, accompagnement et formation.

Plusieurs diagnostics sont proposés en fonction des besoins et du niveau d’expertise attendu. Les professionnels souhaitant aller plus loin (obtention d’un label par exemple) peuvent également solliciter l’appui d’un prestataire extérieur.

Par ailleurs, les entreprises sont éligibles au FNE Formation, un fonds fléché sur la transition écologique et numérique et abondé en 2024. L’objectif est de favoriser l’adaptation des compétences existantes ou l’acquisition de nouvelles compétences. Cette proposition répond à une forte demande du secteur : une étude récente révèle révélant que la montée en compétences techniques des salariés est le premier besoin exprimé par les professionnels actifs sur le marché de la rénovation énergétique*.

Pour en savoir plus : www.constructys.fr

* Etude de l’Observatoire des métiers du BTP de janvier 2024 – évolution de l’emploi et des compétences dans un contexte de croissance du marché de l’entretien-rénovation dans le bâtiment.

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